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Stephenson, Membre du Comité Exécutif 

J’ai 26 ans et je suis né à Port-au-Prince, je crois que ma famille a toujours su que j’étais masisi et qu’ils se sont fait une raison depuis ma naissance car ils ne m’ont pas mis à la porte de chez eux après que je leur ai dit, cependant ils m’ont demandé de rester le plus discret possible, un peu par peur qu’il m’arrive quelque chose, un peu par crainte d’un scandale. Nous vivons dans un quartier populaire. Je suis efféminé mais jusqu’à un an de ça, on me respectait dans mon quartier car j’ai toujours été très respectueux des autres et discret; on m’insultait mais je n’étais pas en danger, enfin c’est ce que je croyais.

 

Il y a un an pourtant, tout a changé, un homme m’a jeté une pierre puis une autre, plus grosse, qui m’a fait mal en me traitant de masisi. Je lui ai répondu, lui ai dit qu’il n’avait pas le droit de me frapper et ai commencé à argumenter avec lui, rapidement, un groupe de garçons sont arrivés avec toute sorte d’objets dont une machette, ils ont commencé à me rouer de coup, et m’ont frappé avec la machette, mais heureusement, j’ai réussi à m’enfuir en entrant dans une maison sur la rue et en sortant par la porte de derrière. J’ai cru que j’aillais mourir ce jour-là, et je crois que je serais mort si par chance je n’avais pas pu m’enfuir.

 

Le lendemain, je suis allé à la police pour porter plainte. On a ri de moi et les policiers ont refusé d’enregistrer ma plainte, me disant que c’était moi qui avais provoqué mes agresseurs et que c’était de ma faute. Humilié et rabaissé, je suis finalement rentré chez moi où j’ai préféré mentir à ma famille pour ne pas entendre encore une fois que c’était de ma faute.

 

Mes plaies ont cicatrisé et je n’ai presque plus mal, mais je garde la peur, quand je marche dans la rue, de me faire agresser à nouveau. Je n’ai pas les moyens de déménager dans un autre quartier et dans ce pays, le seul moyen de ne pas courir le risque de se faire agresser quand on est masisi, c’est de vivre dans une maison sécurisée dans des quartiers aisés et de se déplacer en voiture privée. Je ne savais pas quoi faire jusqu’à ce que Charlot me contacte pour me demander si je voulais faire partie de KOURAJ.

Maintenant, je fais partie d’un groupe, avec des personnes qui comme moi ne veulent pas que les jeunes souffrent et subissent à l’avenir ce que nous endurons chaque jour en Haïti. Je m’engage dans KOURAJ parce que je sais que ce que je risque, je le risque déjà dans la rue, si je me fais frapper, au moins ce sera pour avoir parlé, pour avoir défendu mes droits, plutôt que parce que j’ai baissé les yeux. J’ai peur mais je suis convaincu que nous n’avons pas d’autres choix que de nous engager dans cette lutte.

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